Artothèque

DUPUY Philippe

1960 -

Left

Réalisé en 2021

Acquis en 2023

74 x 103 cm

Arts graphiques, Lithographie, Multiple

 On ne présente plus Philippe Dupuy aux amateurs de bande dessinée. Il a commencé à publier dès ses études aux Arts décoratifs de Paris, en 1979, et n’a jamais cessé depuis, en France comme en Belgique. Il a partagé, en 2008, le grand prix d’Angoulême avec son complice Charles Berberian : ils ont en effet co-signé d’innombrables ouvrages depuis 1983, albums bien sûr, mais aussi livres d’artiste, sérigraphies et / ou lithographies.

C’est justement une lithographie qu’il propose dans le cadre de la commande Emanata. L’image se présente comme la page d’un journal intime. Le « collage » de photolithographies emprunte à un album de famille, au sens strict — la vue de plage a été prise dans les années 1920 par son grand-père — comme au sens figuré : les photogrammes d’algues et de coquillages sont un hommage à Man Ray, l’un des maîtres de Philippe Dupuy.
Les notes renvoient, quant à elles, à un épisode autobiographique douloureux — une paralysie temporaire
de la main droite — qui a conduit l’artiste à dessiner plusieurs mois de la main gauche, et à laisser advenir sous sa plume des figures malhabiles. Le titre de l’œuvre, Left (en anglais, « left », c’est bien entendu la gauche, mais c’est aussi le participe passé de « to leave », « laisser », « lâcher prise »), met le spectateur sur la voie de cette source cachée, tout comme le texte intégré à l’image, qui évoque l’« oubli du geste coutumier », le « membre fantôme » et la « main qui sait ».
Il faut pour déchiffrer ces mots faire un effort. Ils sont, pour la plupart, écrits en miroir, inversés de droite à gauche, comme font les graveurs sur leurs planches pour que l’impression restitue textes ou signatures à l’endroit. Philippe Dupuy réussit le petit prodige de nous parler de lui — et en réalité de nous parler de nous — tout en commentant le procédé qu’il utilise, dans un geste aussi profond qu’il est élégant et léger. A. B.

Philippe Dupuy est né en 1960 à Sainte-Adresse. Il vit et travaille à Bruxelles.

Lithographie et photolithographie sur papier BFK Rives 270g, 5 passages couleur.
Œuvre réalisée en collaboration avec Bruno Robbe à l’atelier Bruno Robbe, Frameries (Belgique).

Cette œuvre a été réalisée dans le cadre de la commande Emanata.
Confiée à des auteurs de bande dessinée et à des artistes la commande d’œuvres d’art imprimé, Emanata* dévoile douze créations originales qui témoignent de la singularité de la création contemporaine et des images. Initiée par le ministère de la Culture dans le cadre de « BD 2020, l’année de la bande dessinée », cette commande, portée par le Centre national des arts plastiques (Cnap) en partenariat avec l’Association de développement et de recherche sur les artothèques (Adra) et la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, d’Angoulême, vise à souligner les liens qu’entretient la bande dessinée avec les arts visuels dans la création contemporaine. Les artistes retenus, par un comité de sélection composé de représentants des commanditaires et des artistes Marion Fayolle et Jochen Gerner, affirment
leur appartenance à l’imaginaire et aux codes de la bande dessinée et de l’image graphique et développent des recherches prospectives et expérimentales. Dans la lignée de Nouvelles Vagues (2010–2018) et de nombreux autres programmes de commande menés depuis 1989, Emanata* crée également un terrain de rencontres et d’échanges de savoir-faire entre artistes et artisans d’art, tout autant passeurs d’images et d’imaginaires.
Les œuvres réalisées sont conservées au sein des collections du Cnap, des artothèques et de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image et viennent enrichir un patrimoine vivant. Destinées par essence à être diffusées largement, les six cent soixante-cinq estampes sont mises à la disposition à la fois
des administrations ou des services de l’État mais aussi des emprunteurs des artothèques. Ce deuxième partenariat avec l’Adra — le premier ayant donné lieu à la commande de multiples Quotidien, en 2019 — permet à nouveau de faire circuler des œuvres de l’espace collectif vers celui de l’intime et de toucher ainsi un public élargi.